[Suite | Banquet] Rituel des forêts du Gévaudan | Event 2.2

Pour être pleinement satisfaite de sa chasse qu’elle eût perdu ou gagné, il ne manquait qu’une seule personne, se dit-elle, qui brillait de son absence. Alaric aurait sûrement été fier, peu importait le résultat. Lui qui lui avait appris à utiliser les armes à feu, aurait sans doute été pleinement satisfait de savoir qu’elle avait participé à la chasse et s’en était brillamment sorti. Tout du moins avait su retourner la légère déconvenue avec les vélanes en sa faveur.
Presque faveur. Elle restait persuadée que la vélane à qui elle avait demande de l’aide s’était un peu moquée d’elle. Mais enfin, pour une fille de la ville, que ce soit égyptienne ou française, elle trouvait qu’elle ne s’en sortait pas trop mal, sans aucune fausse modestie.
Mais la nostalgie de l’absence laissait place à la nostalgie de la jeune adolescente rencontrant de nouveau son premier amour. Est-ce l’euphorie mélangée à la fatigue de la soirée qui appuyait sur le fait qu’elle redevenait une adolescente en sa compagnie ou simplement que ce sourire n’a jamais réellement cessé son effet ? Elle ne saurait le dire. Le fait était qu’elle répondait et qu’elle papillonnait un peu des yeux en ce sentant parfaitement ridicule.
Visiblement, le karma (ou les bons cours de son ex-mari et son talent naturel pour le tir qui l’en avait fait pâlir d’envie) sembla bienveillant à son égard lorsqu’Arsène joua son rôle de baron et hôte de la soirée et annonçant les prix et les classements. Neith applaudit chaleureusement à la nomination des troisièmes positions. La surprise fut néanmoins totale lorsque son identité fut nommée pour la deuxième place. D’un seul coup, elle se mit à chercher son mari près des Lestrange qu’elle arrivait à capter dans l’assistance avant de se rappeler qu’Alaric n’était là que dans son cœur et elle s’autorisa l’espace d’un court instant à lui dédier une pensée silencieuse avant de boire la boisson sans alcool qu’elle tenant.
Merci, Layali.
Son regard sombre se posa sur le ciel avant de revenir à l’assistance. Ses applaudissements furent d’autant plus chaleureux lorsqu’elle entendit le prénom d’Auguste à qui elle adressa un sourire aussi chaleureux que doux. Il avait beau l’avoir abandonnée dans la forêt, elle était heureuse pour lui et peu étonnée du résultat. Il était bien un Lestrange.
Elle se promit néanmoins de s’améliorer pour l’année prochaine. Pourquoi se contenter de la deuxième place alors qu’elle pouvait avoir la première ?
En parlant de deuxième place, elle chercha Marcel Vallet qui par chance se trouvait non loin d’elle.
« Monsieur Vallet, commença-t-elle avec chaleur et euphorie. Je tiens à vous féliciter de votre score. Me voilà honorée de partager la deuxième place à vos côtés. »
Elle baisse la tête avec respect avant de lui tendre la main pour la lui serrer.
Que ne fut pas sa déconvenue lorsque l’homme refusa de la serrer. Neith se raidit et planta son regard dans celui de l’homme et un sourire de façade s’installa sur ses lèvres. Ses yeux, eux, étaient semblables à la froideur des nuits dans le désert.
« Passez néanmoins une bonne soirée. » finit-elle par dire d’une voix calme, trop calme.
Elle notait dûment.
Sa main se baisse et elle lui fait une courte révérence mais pas moins amère. Alors qu’elle revient à Guilhem, elle croise un court instant le regard de sa mère, Rawiya qui la fixait et sans qu’elles ne se parlent, mère et fille se comprirent.
Les hommes…
Elle ne laisserait pas ce goujat lui voler sa joie de la deuxième place et elle s’apprête à dire quelque chose à Guilhem lorsque la voix d’Apolline se fit entendre.
« Merci, Apolline. Mais, s’il te plait, ici, c’est Neith. » lui répondit avec chaleur l’égyptienne. La chaleur fut néanmoins de courte durée. Un soupir calculé lui échappe et Neith prit un air désolé. « Entre celui qui refuse de me serrer la main parce que son égo est blessé de partager sa place avec la femme que je suis, et toi qui refuses de manger les sacrifices de la soirée… » Elle prit un air faussement désolée, décidant d’utiliser l’humour pour adoucir l’ambiance qu’elle trouvait subitement lourde. « Ma fierté s’en remettra. »
Où était son chien d’ailleurs ? Il fallait vraiment qu’elle le félicite. Elle ne serait jamais arrivée deuxième sans lui. Mais féliciter Cerbère serait pour plus tard, son regard se pose sur Guilhem et Apolline. Comprenant qu’il semble se jouer là quelque chose d’important, Neith se mit à siroter sa boisson en les regardant, attendant la suite avec impatience.

Spoiler:

Layali = Mes nuits
Loom of Fate | 2023

L’Apollon est épuisé, maintenant que l’adrénaline retombe il se sent moins dans la fleur de l’âge, et ses trente-cinq années se font ressentir… Horreur, malheur ! Ou peut-être que la lassitude vient du cadre, doux-amer, la nostalgie est une maîtresse puissante et capricieuse dans le domaine d’Apcher, en présence les nombreux membres de sa famille qui ignorent tout de sa présence… sans parler de son ancien amour… C’est qu’il pourrait presque imaginer Germinal et Adhémar débarquer en courant entre les convives, deux enfants innocents et plein de vie. Il aurait presque imaginé courir après eux, sans se soucier des regards courroucés des autres adultes.
Mais s’il y avait bien des fantômes qui hantaient le château, ses deux petits-frères n’en faisaient pas partie. Merlin merci.

Le voilà qui répond, entre mutinerie et sérieux : « Tu es privilégiée disons… personne ne sait… Et j’aime autant que ça reste comme ça. Je peux… compter sur ton silence ? » Il ne pensait pas qu’il pouvait. Parce que qui trahissait une fois, recommencerait si l’occasion se présentait. Mais ce n’était pas comme s’il avait le choix. Il avait envie de rester au moins jusqu’à l’annonce des gagnants. Comme s’il était des leurs, à nouveau, comme s’il avait sa place ici… Le sourire diminué revient de plus belle lorsque Arsène vient discourir, l’arrachant à un tête-à-tête un peu maladroit…

Il applaudit avec enthousiasme (et une certaine fierté, puisqu’il avait sa part dans le résultat, ce qu’il ne manquerait pas de signifier à son cousin par courrier) lorsque Arsène est annoncé troisième, et encore pour la deuxième place qui revient entre autre à Neith. Est-il surpris ? Un peu, mais pas autant que d’autres car il connaissait la victorieuse en question et savait aussi que les femmes étaient autant capables que d’autres… il avait été élevé par sa mère... Mais connaissant Garance (jadis, du moins), elle serait frustrée d’avoir été doublée par une autre qu’une d’Apcher pour entrer dans le classement ! Il lance quelques regards à la dérobée pour tenter de surprendre l’expression de la concernée.
Le chasseur refuse néanmoins d’applaudir lorsque le nom du gagnant est énoncé. Il lève les yeux au ciel, encore rancunier par suite de leur dernière entrevue, même s’il en avait depuis connue de plus désagréables… Giacomo…

« Neith, par la Lune ! Tu as été possédée par Diane ce soir, félicitations ! » Il s’empresse de la complimenter, en oubliant les « madame » et autres politesses, en oubliant leur passé mouvementé, afin d’être le premier à la féliciter avant qu’elle ne s’éloigne. Il ne fera pas de même pour rejoindre Arsène déjà bien entouré par la foule. Son cœur est avec lui, mais son corps sent qu’il serait temps de partir…

…Mais la musique commence…. Pas aussi bonne que celle des Brides Abattues, mais entraînante. Et le fumet capiteux de la viande fraîche cuisant à petit peu le fait presque se lécher ses babines. Nul ne savait mieux cuisiner la viande que les elfes des d’Apcher, loyaux serviteurs des plus grands carnivores de France. Et par les phases de la lune, cela faisait si longtemps qu’il n’y avait pas goûté…
Peut-être que s’il attend encore quelques minutes… Pendant ce rare moment d’hésitation, le fils renié observe avec un vif agacement ce qui se passe entre le vieux croulant Vallet et sa co-gagnante. L’humiliation n’est pas pour lui, mais il le prend tel quel même s’il n’a aucune raison de le faire… Il retient de peu son tempérament parce qu’il y a trop d’Apcher au mètre carré… En parlant d’Apcher…

Il incline un peu plus la tête, ce qui peut passer pour un geste de respect mais obscurcie un peu plus son visage. Son cœur bat à tout rompre et, soudain, tous ses sens sont plus aiguisés, aux aguets à cause de la nervosité. C’est Lili, sa petite Lili plus si petite, plus si jeune, et juste à côté de lui et… Il n’entend même pas ce qu’elle dit. C’est sa sœur et, non, il n’avait pas prévu de la retrouver comme ça, ni jamais en fait, enfin or enterrements puisque c’étaient un peu les seules réunions de familles ou il pouvait être toléré.
Action. Réaction.
Rien de mieux pour éviter une confrontation que fuir… ou attaquer.

Il ignore totalement Apolline et hausse un peu le ton pour appeler le patriarche des Vallets, non loin de lui et de sa charmante (terrifiante) compagnie.

« Je me demandais, Monsieur Vallet… Si votre co-gagnante avait été une femme d’Apcher, auriez-vous refusé de lui donner l’honneur qu’elle mérite ? Mademoiselle Garance ou, peut-être, Lili que voilà ? . » Un sourire narquois et, le mystérieux anonyme assène le coup final, comme s’il cherchait à ce que tous les entende cette fois : « Je ne crois pas non. Après tout, les Vallet connaissent mieux que ça le respect qu’un chien doit à ses maîtres. »

Et il lève son verre avant de le finir cul sec et de se dire que, finalement, peut-être qu’il y avait de l’alcool dedans, ou peut-être que les dernières semaines avaient diminuées son instinct de survie, ou peut-être qu’il avait été trop ambitieux ce soir. Peut-être qu’il devrait juste partir, avec un sans cuisse de sanglier.

Résumé:

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