[Lachesis | Gaëlle d'Adhémar] - The Corpse Lady

1898 Naissance surprise de Gaëlle à Rome. Dernière née de la branche principale d’Adhémar, elle est l’enfant de sa mère. Màire n’a pas pu éduquer ses aînés comme bon lui semble, les choses seront différentes avec sa cadette. Elle sera toujours sa meilleure alliée.
1903 Premiers signes de magie chez Gaëlle. Elle reçoit sa première éducation de la part des précepteurs engagés par sa famille. C’est une enfant vive, qui pose des questions. Beaucoup de questions. Pourquoi le ciel est bleu ? D’où vient la Magie ? Elle fait sourire sa mère, agace parfois sa fratrie. Vivement l’école, pour la petite. En plus du français, on lui apprend l'anglais, l'allemand et des rudiments romanches, héritage suisse oblige.
1909 Entrée de Gaëlle à Beauxbâtons. C’est à la nuit que Mélusine la voue, non sans avoir songé à la laisser rejoindre le jour.
Été 1914 La guerre semble encore loin pour la jeune Gaëlle. Dans les rues du fief familial, elle découvre les joies de la conduite en compagnie d'une amie de sa mère, Flore. Pilote de course, Gaëlle rêve déjà de lui ressembler alors qu'elle se découvre un don pour la mécanique et le volant.
Milieu 1915 Gaëlle devient marraine de guerre, du haut de ses 17 ans. Elle écrit pour ces sorciers qui sont loin de chez eux, pour les amis qu’elle a vu partir au front. Elle ne peut rien faire d’autre. Pour l’instant du moins. Gaëlle réfléchit vite et bien. Elle sera infirmière et elle participera aussi à l’effort de guerre. Alors que la guerre est encore timide dans sa région, elle profite de son retentissement pour passer son certificat de capacité à l'abri des regards.
1916 Gaëlle achève sa scolarité alors que la guerre bat déjà son plein depuis deux ans. Pas le temps de se reposer, pas le temps de tergiverser. Sous le voile des infirmières de la Croix Rouge, elle débute son apprentissage de la médecine. Gaëlle apprend vite, apprend bien. Verdun sera la destination de son propre bataillon d’anges blancs. C’était une erreur. Elle était trop jeune. Une histoire d’homonymie, des Gaëlle, il en existe des centaines. Mais il est déjà trop tard, le bataillon est parti et il serait trop dangereux de le rappeler. Gaëlle apprend, encore et toujours. Elle essuie les tirs d’obus, enfile l’uniforme et conduit jusque sur les champs de bataille pour sauver ceux qui peuvent l’être. Elle perd plusieurs amis chers, certains sur sa table d’opération.
1917 La bataille de Verdun s'achève. Gaëlle est envoyée avec un bataillon d'infirmières au Chemin des Dames où la guerre gronde de plus en plus. Suite à une sortie imprévue sur le champ de bataille pour récupérer des blessés, la jeune femme et trois de ses camarades sont emprisonnés le temps de décider de leur sort. Ils sont finalement graciés, aussi bien par leur bravoure que pour éviter de ranimer des envies de rébellion au sein du bataillon. Gaëlle se casse le nez à cette occasion et le manque de soin à son encontre durant sa captivité le laissera dévié.
1918 Gaëlle n’aura connu la guerre que deux ans. Elle a 20 ans, le nez cassé et plus très droit encore aujourd’hui et des rêves brisés dans sa valise. Elle entend encore les obus, les tirs. L’odeur du sang lui empuantit encore le nez. Mais elle doit vivre. Pour ceux qu’elle a vu mourir, elle vivra. Elle a 20 ans, Gaëlle. Elle n’a connu que la Mort et décide de continuer de soigner. Ses états de service sont bons, très bons même. L’Hôtel Dieu l’accepte comme infirmière dans le service des accidents matériels. Après tout, les organes ne sont-ils pas les moteurs des corps humains ? En parlant de moteurs, il faut bien se déplacer dans la capitale et pour cela, quoi de mieux qu'une voiture ? Une bien belle excuse que Gaëlle utilise pour dépenser ses deniers personnels dans l'achat d'une Peugeot 163. La course attendra !
1920 Gaëlle aura tenu deux ans. Mais elle n’en peut plus, de tout ce sang, de ces accidents sans queue ni tête. La Mort la couve toujours mais elle doit l’apprivoiser autrement. Alors, Gaëlle apprend, encore et toujours. Elle lit énormément, s’entoure encore et toujours des scientifiques Moldus et Sorciers les plus prisés du moment. Elle reste une d’Adhémar et a le goût des mondanités et le Verbe agile, guilleret, malgré ses blessures. Elle arrive à s’attirer la sympathie des fondateurs de l’Institut de Criminologie de Paris. En voilà une bonne piste.
1921 - 1925 Gaëlle quitte l'Hôtel Dieu la tête haute. Elle veut se rendre utile, encore et toujours. Des familles souffrent encore de la disparition d'un père, d'un frère ou d'un fils. Elle a bien appris, auprès de ses amis de la Criminologie et se lance dans une quête un peu folle. Des sorciers manquent toujours à l'appel malgré les efforts des leurs pour les retrouver. Alors, Gaëlle s'entoure des meilleurs et cherche en France, en Belgique et en Allemagne. Elle cherche la preuve d'un passage, d'un décès, d'une sépulture. Elle ramène quelques sorciers chez eux, tape du poing sur la table auprès de l’État Major pour que ces soldats puissent être enterrés près des leurs. Ils ne sont pas nombreux mais c'est toujours ça de pris, ça de fait et un peu de chagrin en moins. Et Gaëlle apprend, encore et toujours. Elle pleure avec ces familles déchirées, elle panse ses douleurs avec eux. Finalement, la Mort peut être tendre à qui sait l'entendre.
1925 Gaëlle aurait pu être doctoresse. Elle en a le titre. Mais l’Hôtel Dieu est rempli de fantômes qu’elle veut fuir. Ses états de service sont excellents malgré tout, son expertise dans les crimes le sont tout autant. Si nom brille, son entourage aussi. C’est naturellement qu’elle rejoint la Cour de Justice. Elle sera légiste, celle qui fait parler les morts quand même la magie n’y peut plus rien. Dame Faucheuse, Gaëlle n’en est pas moins solaire alors que sa vie prend un nouveau tournant. La Mort, elle ne la craint plus. Elle la tient par la main, comme une amie.
1926 Gaëlle assiste au Grand Prix automobile de France. Impressionnée par les capacités techniques des trois voitures gagnantes, elle acquiert par la suite une Bugatti Type 35 pour ses longs trajets, et admettons-le, pour le plaisir de la vitesse. Intérieurement, la jeune femme espère réussir à la modifier suffisamment pour la faire fonctionner non pas au carburant mais à l'aide d'un quelconque sort.
1927 Les élections approchent et Gaëlle s’interroge. Créature de la Nuit, l’Aube lui déplaît. Elle qui n’a jamais rejoint officiellement l’Ordre tant couvé par sa famille, bien qu’ayant une grande sympathie pour lui, elle renoue petit à petit avec l’institution. Elle n’a jamais été en froid avec eux et, à présent que ses blessures de guerre sont pansées, elle est prête à en mener une autre, au cœur de la nuit. Les sorciers et sorcières ont déjà trop souffert, faire d’eux des cibles dans ce monde d’après guerre la révulse.

Maman, tendre Maman,


Je t’en prie, ne m’en veux pas, cela me ferait trop de mal. Je suis désolée, Maman. Tendre Maman, j’aurais du t’écouter et fuir, laisser cette autre Gaëlle me remplacer. Mais je suis sûre que, qu’importe son nom de famille, elle a vu l’horreur comme moi. Nous sommes proches du Bois aux Corbeaux, Maman. Ici, il n’y a que la Mort. Elle brasse les Moldus comme les Sorciers sans distinction. Maman, ils m’ont amené les plaques de Guillaume ce matin. Maman, Guillaume, il ne reviendra pas. Il ne reviendra plus. Je… Je veux rentrer à la maison, Maman. C’est une boucherie ici, Maman. Je sais que tu pleures Maman. Mais il faut que tu le saches. Dieu nous a abandonné. Nous devons choisir qui sauver, Maman. Je donne la Mort, Maman. Je la nourris, elle se repaît de nous tous, d’eux, de moi. Je t’en prie Maman, prie pour moi. Prie pour que tout s’arrête. Tout cela n’est que folie. Prends soin de Diane. Elle ne sait pas encore pour Guillaume. J’ai peur que la Mort la prenne aussi, si elle est seule. Invite-là à la maison s’il te plaît, elle est comme une sœur pour moi. Elle n’a plus que moi.

Dis à Papa que je l’aime aussi. Je ne lui ai jamais assez dit, je veux qu’il le sache. J’espère qu’il ne me déteste pas pour tout cela. Dis-le à tout le monde, Maman.Je dois y retourner. Ici, les anges blancs tombent comme les hommes. Mes amies ont besoin de moi.

Ta Gaëlle.

Extrait d’une correspondance entre deux gradés concernant les actes de désobéissance durant la bataille du Chemin des Dames :

Monsieur,

Je tenais à vous adresser ce courrier concernant plusieurs fauteurs de troubles de votre connaissance. Ce dernier ne saurait être recevable à mon sens. Sauf votre respect, la colère gronde déjà bien trop. On s’inquiète en haut lieu de cet état de fait et les quelques exécutions sommaires qui ont déjà été commandé pourraient raviver les braises que nous nous efforçons d’éteindre dans nos rangs. Ces jeunes gens devraient être médaillés et non pas pendus ou fusillés. Vous me faites-là le récit de jeunes personnes bien courageuses, qui ont fait fi des attaques ennemies pour se porter au secours de leurs camarades laissés pour morts. Je crains que l’esprit vous manque, comme à nous tous. Cette guerre dure depuis déjà depuis plus d’années que nous pouvons le supporter. Pensez-vous réellement que l’exécution de deux infirmières, deux filles de la France parmi les plus nobles et les plus courageuses, des vétéranes de Verdun, ne serait autre chose qu’une folie ? Nous ne sommes pas des chiens, Monsieur, et je ne saurais recevoir ce courrier avec les égards attendus ! Quant aux hommes qui ont assuré leur protection, offrez leur un peu de repos. Ils ont été blessés pour la France et personne ne doit mériter la potence pour cela.

Au contraire, offrez-leur mes remerciements les plus sincères pour leur acte héroïque. Je saurais me souvenir d’eux, la paix revenue. Permettez à cette jeune femme, Gaëlle me semble-t-il, de poursuivre ses sorties si le devoir lui souffle de le faire. Je m’étonne autant que vous de ses compétences au volant d’une automobile mais force est de constater qu’elle est plus habile que bien des soldats de ma connaissance. Elle a mon entière bénédiction. Qu’ils soient tirés de leurs cellules dès que ce courrier aura été lu. Ce jour-là, ils ont sauvé quatre vies et elles rachètent amplement leurs actes, si cela vous importe. Et que ces jeunes femmes soient armées durant leurs sorties. Je n’apprécie guère de les savoir ainsi chargées mais elles ont fait preuve d’un sang-froid remarquable face à ces soldats ennemis.

Que Dieu nous garde de la folie, Monsieur.

Extrait d’un rapport d’autopsie rédigé à l’intention de la Cour de Justice Magique :

L’autopsie a débuté à 16h00 ce 6 juin 1926. Examen mené en la présence d’un envoyé de la Cour de Justice. Rigidité cadavérique totale, corps froid depuis sa découverte. Présence d’importantes lividités cadavériques mais absence d’insectes. La mort de l’individu anonyme semble remonter à 3 jours. L’absence d’insectes nécrophages malgré la chaude saison pourrait indiquer que le corps a été déplacé depuis un lieu abrité. Piste criminelle plus que probable, dossier transmis au Bureau de la justice magique pour de plus amples enquêtes.

Cause de la mort : Enfoncement de l’arrière de la boîte crânienne. Traumatisme crânien.

Gaëlle d’Adhémar, doctoresse-légiste.