Famille Colonna [4/4]

« Semper Immota » dit leur devise, comprenez « Toujours inébranlable ». Descendants du grand César lui-même, les princes de Rome se gavent depuis toujours de pouvoir, bien qu’ils ne régnèrent jamais pleinement sur la ville éternelle, sous l’autorité directe du pape. Mais si vous écoutez les Colonna, il n’existe en Italie plus noble que leur nom, mieux encore quand leur sang ne s’est jamais dilué. Vieux rivaux des Orsini, le temps a écrasé ceux-ci quand le destin des Colonna à travers le temps, lui, fut tout autre.

Car si les armoiries de la grande maison Colonna ne cessèrent jamais de flotter au-dessus de Rome, l’argent glissa entre leurs doigts. Après avoir brillé dès l’Antiquité avec leurs arènes de combat de lycans, marqué la Renaissance, compté trois papes et plus encore de puissants, les Temps modernes ne leur sourirent point. Investissements risqués et suite de mauvaises décisions, les Colonna furent contraints de délaisser les plus beaux de leurs biens au milieu des années 1800.

Eux qui louaient la culture et se vautraient dans le luxe perdirent or et biens. Les peintures somptueuses, vendues, les résidences secondaires, louées, les parts de leurs arènes, bradées. Tout pour faire rentrer un peu d’argent dans leurs caisses poussiéreuses. Le Palazzo Colonna se vidait de toutes ses richesses et dès 1880, ils surnommèrent leur demeure principale le palais des courants d’air.

Leur restait la foi et leur magie. Pas plus puissante qu’une autre mais un don, apparu par le biais d’Ugo Colonna autour de 816, qui mena la reconquista de l’île de Corse et tomba sous le charme d’une sorcière Maure. Certains crurent qu’à défaut de son sang pur il souilla son sang bleu en l’épousant, mais les enfants qu’elle lui donna donnèrent raison au conquérant – la double vue, dès lors, passa de fille en fille chez les Colonna. Un puissant don pour certaines, une malédiction pour d’autres.

La foi, elle, leur fit prendre la route de l’Eglise et du mariage pour retrouver de leur superbe en 1900 : l’aînée des filles de Pompeo Colonna et Vittoria Mazzarini, Agnes, fut vendue à Lorenzo de Medici pour s’offrir tout l’or de ceux-ci. Depuis cette année-là, les caisses renflouées, le palais des courants d’air se remplit de nouveau. Ce mariage glorieux ouvrit la porte à de nouvelles alliances et leurs autres filles purent suivre cette même voie.

Et les princes de Rome sont alors prêts à briller, de nouveau, aux yeux du monde. Premier investissement de Pompeo une fois la fortune retrouvée, le rachat des parts vendues de ses arènes de combat de lycans, dont les Colonna se sont gavés toute leur existence. Maintenant de nouveau à leur tête, c’est bien dans leurs caisses que revient tout l’argent. Puis ensuite, les œuvres d’art, les résidences secondaires, tout – le temps de la démesure était revenu.