I don't mean to get dark, but I guess that's just life | ft Emile
Giacomo de Medici
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(#) I don't mean to get dark, but I guess that's just life | ft Emile
missive rédigée par Galahad Anderson le5 mai 1927 – ft @Emile Teyssier
We're all wrapped up in greed
Le soleil tombe sur les calanques, baignant les flots d'une lueur rougeâtre, tandis que s'allument autour des échoppes du marché flottant de charmantes petites loupiottes colorées qui éviteront aux sorciers affairés de tomber à l'eau. Car il y a du monde pour se presser sur les plateformes clapotant paresseusement sur les flots, et ce malgré l'heure tardive. Les jours se rallongent, le printemps réchauffe de son soleil le Sud de la France - en témoignent les tenues plus légères, évocatrices d'un été qui semble déjà pointer le bout de son nez. On partage des douceurs achetées à un étal avant d'aller marchander à un autre, on flâne en profitant des derniers rayons du soleil mourant, on reste en plein milieu du chemin pour échanger les dernières nouvelles avec des accointances croisées par hasard. Les discussions enthousiastes se mêlent en un bourdonnement entraînant, créant presque une discrète musique, un air entraînant, fêtard. Mais s'il en est un qui n'a pas réellement l'esprit à la fête, c'est bien Galahad - l'a-t-il jamais, cela dit ? Traînant son air maussade, presque une tête au-dessus du reste de la foule, il parcourt les passerelles en posant un regard sombre sur chaque passant, cerbère à la chaîne lâche, mais ne s'éloignant jamais trop de son repère. En l'occurrence, le prêteur sur gages servant de couverture aux Savelli en ces lieux, et où doit se rendre sa cible du soir.
Après plus d'un an à les servir, Galahad a su se faire apprécier de ses nouveaux maîtres par bien des aspects. Ne pas poser de question. Faire le nécessaire, sans superflu, sans ciller non plus. Jouer tantôt le chien de garde, tantôt le molosse d'attaque. Le rôle qu'il devra endosser ce soir ne dépend pas vraiment de lui. Plutôt du curieux qui met trop son nez dans leurs affaires, qui pose trop de questions dans la cité phocéenne, comme décidé à en retourner les murs. Pour quoi faire ? Il n'en sait rien. Et il s'en fiche. Seul compte ce qu'il sera nécessaire de faire pour décourager l'intrus, censé se pointer d'un instant à l'autre à proximité de l'antre des Savelli. Les badauds se pressant à ses côtés, flot dense et continu, ne l'inquiètent en rien. L'expérience lui a appris qu'il est bien plus facile de faire disparaître quelqu'un au milieu d'une foule. Mais Galahad a trop fréquenté la violence pour l'apprécier, et espère sincèrement qu'il ne devra pas en arriver là. A raison : sa carrure suffit généralement à décourager les curieux, et une ou deux remarques empruntes de menace calment les plus insistants. La plupart du temps. Dans le cas contraire ... avec l'obscurité, une tête de moins dans la foule ne fera pas hausser un seul sourcil, et la moindre venelle, la moindre plateforme, peut se transformer en coupe-gorge.
Il patrouille depuis assez longtemps désormais pour s'être habitué au léger balancement sous ses pieds, écho de la faible houle agitant la Méditerranée ce soir. Les lumières du marché éclairent les visages de nuances de bleu, d'orange et de violet. Il parvient cependant à reconnaître les traits attendus, prend un instant pour les observer avant de se manifester. L'homme est petit, brun, plutôt quelconque somme toute, le genre qu'on classifierait en citoyen lambda sans se poser plus de question. Mais Galahad n'est pas là pour se poser en juge - et, avec un peu de chance, n'aura pas non plus à jouer au bourreau. Il joue un peu des épaules, se fraye un passage jusqu'à se retrouver dans le dos de sa cible. « Emile Teyssier ? » Ce n'est pas réellement une question - et il ne compte aucunement se présenter en retour. Il se fera colosse anonyme, oubliable, car quel intérêt y a-t-il à retenir l'apparence du mur auquel on se heurte ? Il attend que le sorcier se retourne, pour mieux le contempler de toute sa hauteur, bras croisés et visage impassible à l'appui. « Vous vouliez vous adresser à mes employeurs. Je serai votre contact. » On lui a promis un rendez-vous pour répondre à ses questions, meilleur moyen de faire sortir la souris de son trou, de la pousser au grand jour, où il sera plus facile de la faire fuir pour de bon.
(#) Re: I don't mean to get dark, but I guess that's just life | ft Emile
missive rédigée par Emile Teyssier leI don't mean to get dark, but I guess that's just life
@Galahad Anderson & @Emile Teyssier
le 5 mai 1927
cw : /
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Émile avait, au fil des années, appris à connaître le marché flottant. Il lui semble parfois, qu'au plus profond de ses rêves, quand les bras tendres de Morphée se déforment pour venir l'étouffer, pensées tordant milles horreurs, il aperçoit ses allées et ses caisses, les flottes qui se bataillent son attention. Marseille vivante, ses matelots, ses capitaines et ses filles de joie secouant ses cauchemars. L'image, pourtant, devrait être celle de doux rêves. Promesses de voyages et de richesses, d'aventures et rencontres soudaines, de pièces échangées contre une choppe d'hydromel frais ; le Couturier, lui, n'y voyait que son épouvantard rebondir d'échoppes en échoppes. Leurs portes, toujours désespérément closes.
Ce soir, seulement, les choses pouvaient en être autrement. Il est vrai qu'Emile se murmure les mêmes mots, inlassablement, depuis vingt ans qu'il bat le pavé du marché phocéen, mais il y a, dans l'air, peut-être, dans le salin de la mer qui vient titiller ses narines, une sorte de réconfort, de gage de réussite. C'est qu'il a lutté, le Carcassonnais, pour calmer les assauts de la mer marseillaise et des centaines de secrets qui se dissimulent dans ses remous. Longtemps, les passerelles et étals du marché s'étaient amusés à le faire tourner en rond, fausses informations traînant d'oreille en oreille jusqu'à retomber dans celle, trop naïve, du Teyssier. Il était jeune, si jeune, la vingtaine à peine, quand il a tempêté pour la première fois en plein marché illuminé, cœur encore trop vif des ignominies familiales. Son désespoir se conjuguait alors aux danses festives d'un été au bord de mer, ses larmes risibles face aux gorgées déployées des badauds. Il n'était plus si niais, Emile. Son esprit, endurci d'années à se construire, seul, loin de l'héritage familial, à grimper dans les rangs et se faire des amis aux airs qui font taire les nigauds. Son cœur, d'artichaut peut-être, mais suffisamment noirci par ses cauchemars qu'on ne saurait plus le tordre par plaisir. Il saura, ce soir, s'affirmer pour qu'enfin, son coup de pied fasse tomber la porte barrée de Marseille.
Avant d’en arriver là, toutefois, il lui fallait trouver son contact. Facile à dire, quand la seule directive qu’on avait bien voulu lui donner était un maigre : « on vous trouvera ». Merci, gentilshommes, voilà un couturier bien avancé. L’endroit est dense, Emile autant happé par la foule que secoué par la houle méditerranéenne. On tente de le héler, tisserand comme poissonnier agitant leurs stocks de la journée. Il faut tout écouler, avant que la nuit n’engloutisse les bourses, déliées plus facilement pour des bouteilles de pastis, invention de la décennie affolant les ivrognes. Le couturier s’en détourne, là où il s’abandonnerait d’ordinaire volontiers à tâter ça et là la marchandise, l’esprit trop occupé à se faire trouver. Sûrement, sont-ils assez renseignés pour que - Là, son nom, grondé dans son dos. Emile redresse l’échine, lisse son expression et arbore un sourire contrôlé.
« Lui-même », accorde-t-il à l’homme qui l’a interpelé. « À qui ai-je l’honneur ? ». La voix reste calme, alors que ses yeux dévalent la montagne qui se dresse devant lui. S’il lui fallait la grimper, pour que Marseille s’ouvre à lui, Emile allait devoir s’armer de patience et courage. Il n’y avait, après tout, pas un semblant de volonté d’amitiés chez le colosse aux bras croisés. Il semble presque se faire plus grand, comme pour intimider le couturier. Il s’autorise un rictus plus narquois, cette fois, que son sourire contrôlé ; est-ce là l’accueil qu’on lui propose ? C’était, ma foi, mieux que les coups dans les jambes et les menaces susurrées au fil de ses enquêtes dans la cité phocéenne. Le contact de ses employeurs, donc, se tenait devant lui. Etait-ce ainsi qu’il devait s’adresser au colosse ? Les Savelli se trouvaient-ils si supérieurs à tous, sur ce marché flottant, qu’ils arrachaient à leurs hommes de main toute identité ? Emile lui tend la main, insiste : « Et donc, à qui ai-je l’honneur ? ». Il soupire, surjouant sa déconvenue. « Au vu des sujets qui seront abordés, sûrement sera-t-il plus aisé de nous présenter convenablement. Comptez-vous nous mener quelque part, d’ailleurs, ou dois-je crier à la volée les affaires pour lesquelles vos… employés sont de mes préoccupations ? »
Tête légèrement penchée, Emile lève les yeux vers l’homme de main des Savelli. « Après tout, vous connaissez certainement le meilleur endroit où tenir une discussion digne de ce nom, Monsieur… ? » Et, toujours, cet air confiant. Qu’on ne dise pas que le Teyssier, droit sur cette passerelle branlante, était à l’image de celui d’il y a vingt ans, balbutiant rien qu’à entendre le nom des Savelli.
752 mots (c) oxymort
taking different roads ;
love will tear us apart again ᛉ
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(#) Re: I don't mean to get dark, but I guess that's just life | ft Emile
missive rédigée par Galahad Anderson le5 mai 1927 – ft @Emile Teyssier
We're all wrapped up in greed
La tâche s'annonce ardue. Voilà ce que promet le sourire absolument pas inquiet, répondant au grondement qu'il a émis en guise de bienvenue. Si le type face à lui a ressenti le moindre émoi, alors il sait très bien le cacher. Mais Galahad en doute d'autant plus que l'expression a même le toupet de se faire narquoise. Le défie-t-il de sévir ici, au milieu de la foule ? Cela ne lui poserait aucun problème. La plupart des sorciers marseillais savent très bien quand tourner leur attention ailleurs - quant aux autres, quelques bézants peuvent les en convaincre. Or quelque chose lui souffle que ce petit gars-là n'est pas de ceux dont on achètera le silence. Ou la tranquillité. Galahad en soupirerait presque déjà. Il n'a aucune envie de se tourner vers la violence - mais aura-t-il le choix ? Son identité est exigée, mais la demande ne reçoit qu'un silence buté. Pas de découragement en vue, cela dit. Une main se tend vers lui, se voit accueillie par un regard glacial et des bras restant obstinément croisés. Il assez côtoyé de petites frappes se croyant trop malines pour savoir quand se coucher, si bien que cette petite mascarade l'ennuie tout au plus. Le Teyssier doit le sentir, car la stratégie ne tarde pas à changer. Les paroles se font plus habiles, sifflent à son oreille des doutes qu'il avait jusque là refusé d'avoir. Aux mots crier à la volée, les épaules de Galahad se crispent légèrement, tandis que ses yeux s'en vont voler sur les visages qui les entourent, sur les regards qui évitent de croiser le sien, mais qui se détournent un poil trop tard. Et s'il avait raison ? Si des oreilles indiscrètes traînaient, prêtes à répandre des rumeurs, à répéter des informations sensibles ? En bon chien de garde, il ne sait même pas sur quoi portent les questions d’Émile - seulement qu'il doit les faire taire.
« Monsieur Anderson » finit-il par céder, agacement tout juste perceptible derrière le masque d'acier. Et presque malgré lui, il garde un œil attentif sur les traits du Teyssier, épie sa réaction, cherche à savoir si son nom sonne familier. Ses parents, et leurs exactions, avaient fait les joies de la presse à l'époque de leur attentat au secret. Mais la République s'est bien chargée d'étouffer cette malheureuse affaire, et il est rare que son patronyme y soit désormais attaché. Sauf qu'il a depuis eu ses propres faits d'armes, et son identité a eu l'occasion de refaire le tour des journaux ... Bah, qu'importe que l'autre le sache ancien condamné - ça ne donnera que plus de poids à ses menaces. « Nul besoin de crier. Mais soit. Venez avec moi. » Et sans prévenir davantage, il saisit la veste de l'homme juste à côté du col pour le forcer à pivoter, le dirigeant vers l'échoppe des Savelli et lui emboîtant le pas dans la foulée. Le geste est brutal, tandis que le regard, lui, s'est fait acéré. Galahad guette le moindre mouvement, le tressaillement réflexe qui trahirait l'envie de saisir sa baguette pour se défendre, ou du moins qui indiquerait où le précieux instrument est caché. La sienne est sagement rangée dans un holster, contre sa poitrine - à côté d'une autre arme nettement moins conventionnelle parmi les sorciers, mais beaucoup plus fiable entre ses doigts. « Pas de sort malheureux » gronde-t-il à mi-voix, avant que, d'une impulsion, il ne pousse l'homme devant lui. Sa main ne quitte pas l'épaule du Teyssier, poigne de fer le guidant sans douceur dans la foule.
Ils n'ont pas besoin d'aller très loin ; entre les lampions colorés apparaît bientôt leur destination. La planque des Savelli ne se cache pas dans l'ombre, mais prend au contraire l'apparence d'un honnête prêteur sur gages - autant que l'on puisse être honnête dans cette profession. L'échoppe, posée sur pilotis, s'ouvre sur les passerelles du marché, presque accueillante sous la lueur du crépuscule, mais pas très fréquentée malgré tout. Une seule âme s'y trouve, lorsqu'il y pénètrent. Un jeune sorcier à peine plus âgé d'un adolescent, qui leur adresse un grand regard interrogateur, interrompu dans le comptage de bézants auquel il était soigneusement occupé. Bloqué en plein geste, il garde dans une main une petite pile de pièces, dans l'autre le tube de métal qui s'apprêtait à les recevoir. Un signe de tête de Galahad, et tout ce précieux chargement retrouve la table dans un bruyant cliquetis, tandis que le gamin quitte les lieux avec une précipitation mal camouflée. « Voilà » commente sobrement le molosse, avant de tirer deux chaises abandonnées dans un coin, s'asseyant lourdement sur l'une d'elle et offrant la seconde à son invité de fortune. « Je vous écoute. » Plus précisément, il le laissera vider son sac avant de lui expliquer à sa manière que ses recherches s'arrêtent là. Simple. En théorie. Mais ce type a l'air trop confiant. Sans doute aurait-il mieux fait de lui coller une beigne à l'arrière du crâne avant de le balancer à l'eau. Quoique, il aurait été capable d'aller flotter jusqu'au rivage pour y créer de nouveaux problèmes ...
(#) Re: I don't mean to get dark, but I guess that's just life | ft Emile
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